Végétalisation : comment les arbres gagnent les villes
Publié le 30/11/2023 3 minutes de lecture
La végétalisation urbaine constitue un enjeu majeur qui concerne les communes, mais aussi le secteur privé. Renforcée par de nouvelles contraintes législatives, une filière émerge.
En zone urbaine, les végétaux, et particulièrement les arbres, réduisent les îlots de chaleur, stockent du carbone, facilitent les transports doux en les rendant plus agréables, rafraîchissent les murs, favorisent la biodiversité, épurent l’air, les sols, l’eau, protègent du soleil, du bruit et du vent. Selon l’OMS, 10 à 15 m² d’espaces verts par habitant sont nécessaires pour garantir la santé et le bien-être des citadins.
Il faut bien sûr adapter les essences aux conditions climatiques, géologiques et urbaines locales, à la profondeur du terrain, à l’éloignement par rapport au bâti, aux moyens humains et financiers disponibles pour assurer la maintenance. Selon une étude publiée dans Nature Climate Change, d’ici 2050, le réchauffement climatique et le manque d’eau condamnent plus des deux tiers des essences d’arbres actuellement plantées dans les villes. Environ 60% sont déjà en souffrance. La végétalisation urbaine se heurte à de nombreux obstacles : la pollution des sols et de l’air, la pression foncière, le besoin d’eau et de lumière, le risque de développement d’allergies liées au pollen, le manque d’espaces perméables.
Des outils pour aider les villes
Depuis 2016, l’ADEME propose une base de données disponible en open data. « ARBOClimat permet de réaliser des simulations prospectives de plantation d’arbres en ville et d’en évaluer les impacts selon divers indicateurs comme la capacité à stocker le carbone, l’intérêt pour la biodiversité, l’impact sur la qualité de l’air ou le potentiel allergisant ». Développé par Plante&Cité, le site Floriscope permet d’accéder gratuitement à un outil d’aide au choix des végétaux. Sésame identifie les espèces pertinentes pour des projets d’aménagement ou de végétalisation. « À ce jour, le développement de Sésame est réalisé ou en cours de finalisation, sur sept territoires : Metz, Paris, Seine Saint-Denis, Libourne, Angoulême, Bouches-du Rhône, Moselle, et d’autres déclinaisons sont en projet », annonce son éditeur, le Cerema.
D’autres acteurs se mobilisent sur l’aspect financier. La Société Forestière de la Caisse des Dépôts travaille actuellement sur « ville arborée ». Cette initiative doit conduire à la création d’un référentiel de labellisation bas-carbone de projets de végétalisation urbaine. Le label bas carbone permet de capter des fonds versés par des émetteurs de CO2. Ces derniers peuvent ainsi contrebalancer leurs émissions en finançant des projets de réduction ou de séquestration du carbone.
Obligation de végétaliser les toitures ou d’installer des panneaux solaires
La végétalisation urbaine concerne bien sûr la plantation d’arbres, mais aussi le développement de toits cultivés, de cultures sur façades ou encore de jardins partagés. Les toitures représentent en moyenne plus de 30 % de la superficie totale des villes occidentales. Selon l’AGAM ( Agence d’urbanisme de l’agglomération marseillaise ), « le développement du végétal à grande échelle doit être concomitant avec le redéploiement d’une trame bleue, parfois en restaurant les anciens lits naturels des cours d’eau. Plus un milieu est riche en biodiversité, plus il sera résilient ».
L’association des toitures et façades végétales a publié en 2023 une « enquête sur le bâti végétalisé en France en 2021 ». Selon l’Adivet, la filière concerne 1 200 entreprises pour un chiffre d’affaires 2021 de 220 M€. Les deux tiers des surfaces végétalisées, soit 1,6 million de m² en 2021, ont été commandités par des donneurs d’ordres privés. Ce chiffre devrait exploser, car depuis 2021 avec la loi Climat puis 2023 avec la loi AER (Accélération de la production des énergies renouvelables), l’État impose la végétalisation ou la pose de panneaux solaires sur les toits des parkings couverts, constructions à usage commercial, industriel, artisanal, d’entrepôt ou de bureaux, à partir de 500 m² à 1 000 m² d’emprise au sol selon le type de bâtiments. Cette obligation concerne aussi bien le neuf que la rénovation.
Des « bons de végétalisation » pour rendre la ville plus verte
Avec le permis de végétaliser « Rue Jardin », la Ville de Marseille propose aux particuliers d’orner leur rue d’arbustes, plantes ou fleurs, à condition de respecter certaines règles de partage de la voie publique. La municipalité fournit les plants pour la première installation. L’AOT (Autorisation d’Occupation Temporaire) s’étend sur une durée de trois ans renouvelables.
Montpellier s’est dotée d’une « charte de l’arbre » et d’un programme « Montpellier Ville Nature ». « L’effet cumulé de la désimperméabilisation des sols, de la plantation d’arbres et de l’augmentation de la présence de l’eau devrait permettre de réduire de 2°C à 7°C la température ressentie sur la place de la Comédie et l’Esplanade », espère la municipalité. La ville plante des arbres et propose parallèlement à ses administrés trois types de « bons de végétalisation » : microfleurissement, pied d’arbre ou arbre fruitier. « Chacun d’entre eux a ses spécificités qui font l’objet d’une étude de faisabilité par les services de la ville afin d’analyser les conditions techniques de la mise en œuvre. La ville se charge de la mise en place technique et matérielle, les participants assurent la plantation et l’entretien », précise la mairie. Des exemples inspirants pour rendre les villes françaises plus vertes.
Par la rédaction decarbonation2030