Scope 1, 2, 3… tout savoir sur le bilan carbone
Publié le 17/04/2024 4 minutes de lecture
Le bilan carbone est une évaluation exhaustive des émissions de gaz à effet de serre générées directement ou indirectement par une entreprise, une collectivité ou un produit.
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Scope 1, 2, 3… tout savoir sur le bilan carbone et son cadre légal en France
L’établissement du bilan carbone constitue souvent la première étape pour une politique RSE mature pour les entreprises ou d’un « plan vert » pour les collectivités.
Cet outil, qui permet d’évaluer de manière exhaustive les émissions de gaz à effet de serre générés par une entité ou une activité, est passé d’un levier RSE à une obligation légale pour des dizaines de milliers d’entreprises et de collectivités en France. Décryptage…
Qu’est-ce que le bilan carbone ?
Le bilan carbone est une évaluation exhaustive des émissions de gaz à effet de serre (GES) générées directement ou indirectement par une entreprise, une collectivité, mais aussi un produit, un service ou encore un événement, traduites en tonnes d’équivalent dioxyde de carbone (CO2e).
Cette mesure se veut holistique dans la mesure où elle englobe toutes les sources significatives d’émissions de GES, depuis la production de matières premières jusqu’à la fin de vie du produit, en passant par l’énergie utilisée et le transport, que ces actions soient réalisées par l’entité concernée ou d’autres parties de sa chaîne de valeur. Nous développerons ce point plus bas avec la notion de « scope d’émissions » du bilan carbone.
L’objectif final est de quantifier l’impact sur l’environnement (notamment le climat) de l’entité étudiée pour :
- La situer par rapport aux normes légales, le cas échéant ;
- Comparer le bilan carbone à des benchmarks sectoriels ;
- Identifier des opportunités de réduction des émissions ;
- Alimenter une dynamique RSE pour une entreprise, ou un « plan vert » pour une collectivité ;
- Départager des fournisseurs ou prestataires dans le cadre d’un appel d’offres.
La réalisation d’un bilan carbone commence par la définition du périmètre de l’analyse, qui peut couvrir l’ensemble des activités d’une entreprise, un produit spécifique ou un service. Une fois ces limites établies, il s’agit de collecter des données sur toutes les activités susceptibles de générer des émissions de GES, avec un accent sur la consommation d’énergie fossile, le transport, les procédés industriels ou encore les voyages d’affaires.
Ces données sont ensuite converties en émissions de CO2e en utilisant des facteurs d’émission standards qui reflètent la quantité de GES émise par unité d’activité, par exemple le kilowattheure d’électricité consommé ou le kilomètre parcouru par un mode de transport donné.
Le bilan carbone, le GHG Protocol et la naissance des scopes d’émissions
Le Protocole des Gaz à Effet de Serre, ou GHG Protocol, est à l’origine de la méthodologie du bilan carbone, sous l’impulsion du World Resources Institute (WRI) et du World Business Council for Sustainable Development (WBCSD), à la fin des années 1990.
Face à l’absence de normalisation dans l’évaluation des émissions de gaz à effet de serre, ce protocole a été développé pour fournir aux entreprises et aux gouvernements un cadre standardisé pour quantifier, gérer et rapporter leurs émissions de gaz à effet de serre.
C’est le GHG Protocol qui a émis l’idée des trois catégories d’émissions que nous connaissons aujourd’hui afin d’en structurer la comptabilité :
- Le scope 1 du bilan carbone, qui couvre les émissions directes provenant de sources propriétaires ou contrôlées par l’organisation en question, comme les émissions provenant de ses installations industrielles ou de ses propres véhicules ;
- Le scope 2 du bilan carbone, qui englobe les émissions indirectes liées à la consommation d’énergie achetée, principalement l’électricité, mais aussi la chaleur et la vapeur ;
- Le scope 3 du bilan carbone, qui intègre toutes les autres émissions indirectes qui se produisent dans la chaîne de valeur de l’organisation, comme celles associées à la production des matières premières, au transport des produits achetés, aux déplacements professionnels des employés et au traitement des déchets générés par l’activité de l’entreprise.
Le GHG Protocol a donc normalisé la manière dont les organisations mesurent et rapportent leurs émissions pour faciliter les comparaisons. Il a également fourni aux Etats un cadre méthodologique et des données pour légiférer. C’est le cas en France, comme nous le verrons dans la suite de cet article.
Le scope 1 du bilan carbone
Le scope 1 du bilan carbone désigne les émissions directes de gaz à effet de serre générées par les activités sur lesquelles l’organisation en question a un contrôle total ou partiel.
Il s’agit essentiellement de la combustion de carburants dans les installations fixes comme les chaudières, les fours, ou les processus industriels qui appartiennent à l’entreprise, ainsi que les émissions des sources mobiles, notamment les véhicules thermiques qui fonctionnent au diesel, à l’essence ou au gaz naturel.
Le scope 1 du bilan carbone englobe également les émissions fugitives, qui résultent de fuites, de décharges non intentionnelles ou d’autres rejets de gaz à effet de serre, comme le méthane dans le secteur de l’énergie ou les hydrofluorocarbures utilisés dans les systèmes de réfrigération et de climatisation.
La mesure du scope 1 constitue la première étape vers la mise en œuvre du bilan carbone et, plus largement, la mise en place de mesures de sobriété énergétique dans le cadre d’une politique RSE. C’est également le scope le moins difficile à mesurer, car il ne repose que sur des données sur lesquelles l’entreprise ou l’organisation a la main.
Exemple concret du scope 1 du bilan carbone
Une entreprise du secteur agroalimentaire, spécialisée dans les produits laitiers, recense les éléments du scope 1 de son bilan carbone. Elle dispose d’une ferme laitière, d’une usine de transformation et d’une flotte de distribution.
Les émissions de la ferme laitière englobent :
- La combustion directe, avec l’utilisation de carburants (diesel, essence) pour les machines agricoles et les générateurs ;
- Les émissions causées par la fermentation entérique, avec la production de méthane par les ruminants lors de la digestion ;
- La gestion du fumier, avec les émissions de méthane et d’oxyde nitreux lors de la gestion et du stockage du fumier.
Pour l’usine de transformation :
- Combustion dans les installations fixes : utilisation de gaz naturel ou de fioul pour les chaudières qui produisent la vapeur nécessaire aux processus de pasteurisation et de stérilisation ;
- Divers procédés industriels, notamment les émissions liées à la transformation des produits laitiers (fermentation et autres réactions chimiques).
Le scope 3 intègre enfin les émissions des véhicules de l’entreprise et des sources mobiles non routières :
- Flotte de distribution : Émissions dues à la combustion de carburants dans les camions de livraison de l’entreprise qui distribuent les produits finis aux points de vente.
- Véhicules de service : Émissions des véhicules légers utilisés pour le transport du personnel, la maintenance, ou d’autres services internes.
- Émissions des sources mobiles non routières : utilisation de tracteurs, de moissonneuses et d’autres équipements agricoles motorisés nécessaires à l’activité.
A ces éléments s’ajoutent les émissions fugitives, à savoir les fuites de gaz réfrigérants des systèmes de réfrigération et de climatisation utilisés dans la ferme, l’usine de transformation et les véhicules de transport frigorifique.
Le scope 2 du bilan carbone
Le scope 2 concerne les émissions indirectes de gaz à effet de serre liées à l’achat d’électricité, de chaleur ou de vapeur utilisés par l’entité.
Contrairement aux émissions directes du scope 1, ce volet s’intéresse aux sources non possédées et non contrôlées par l’entreprise, mais qui répondent à ses besoins énergétiques.
Pour calculer les émissions du scope 2, l’entité doit tenir compte de l’énergie qu’elle consomme et des facteurs d’émission associés à cette consommation. La mixité énergétique du pays ou de la région d’implantation ont une influence directe et majeure sur ce scope du bilan carbone (la proportion de charbon, de gaz naturel, d’énergie nucléaire, hydraulique, solaire, éolienne… utilisée pour produire l’électricité consommée).
Ainsi, les émissions du scope 2 d’une entreprise située dans une région dépendante du charbon seront significativement plus élevées que celles d’une entreprise qui opère dans une région où l’électricité est majoritairement produite à partir de sources renouvelables.
Dans la pratique, le scope 2 intègre toutes les émissions énergétiques qui ne figurent pas dans le scope 1.
Exemple concret du scope 2 du bilan carbone
Prenons l’exemple d’une entreprise de fabrication de meubles. L’entreprise possède une usine où elle utilise des machines qui fonctionnent au gaz naturel pour chauffer les locaux et effectuer certains procédés de fabrication nécessitant de la chaleur, comme le séchage du bois. Elle dispose également d’une petite flotte de camions diesel pour le transport des matières premières depuis les fournisseurs jusqu’à l’usine.
- Les émissions directes de gaz à effet de serre qui résultent de la combustion du gaz naturel dans les installations de l’usine et du diesel dans les camions entrent dans le scope 1.
Pour faire fonctionner ses équipements électriques comme les scies, les perceuses et l’éclairage de l’usine, l’entreprise doit acheter de l’électricité auprès d’un fournisseur local. Cette électricité est produite à partir d’une combinaison de sources d’énergie, à savoir le charbon, des installations solaires et du nucléaire.
- Bien que l’entreprise n’émette pas directement de gaz à effet de serre en utilisant l’électricité (les émissions se produisent au niveau de la centrale électrique), ces émissions indirectes lui sont attribuées dans le cadre du scope 2 de son bilan carbone.
Le scope 3 du bilan carbone
Le scope 3 du bilan carbone englobe les émissions indirectes de gaz à effet de serre enregistrées tout au long de la chaîne de valeur de l’entité, auprès des tiers qui lui permettent d’exercer son activité.
C’est le scope du bilan carbone le plus difficile à appréhender, dans la mesure où il concerne plusieurs acteurs qui ne disposent pas tous des compétences, des outils et/ou de la maturité nécessaires pour mesurer leur bilan carbone, même dans ses deux premiers scopes.
Le scope 3 du bilan carbone est généralement divisé en deux catégories :
- Les activités en amont : émissions relatives au produits ou services achetés, amortissement des machines, émissions produites par les biens loués, etc.
- Les activités en aval : utilisation des produits ou services par les consommateurs, émissions des franchisés, fin de vie des produits lorsqu’elle est gérée par des tiers, etc.
💡 À savoir |
Pour aider les entreprises à mieux appréhender le scope 3 de leur bilan carbone, l’ADEME a noué un partenariat avec Bpifrance et l’Association Bilan Carbone dans le cadre du programme d’accompagnement Diag Décarbon’Action. Il prévoit l’intervention d’experts qualifiés, l’élaboration d’un plan d’action pour la décarbonation de l’entreprise, la mise en place des premières actions de conduite du changement ainsi qu’une subvention allant jusqu’à 6 000 €. |
Exemple concret du scope 3 du bilan carbone
Une entreprise de prêt-à-porter conçoit, fabrique et vend des vêtements à travers un réseau de boutiques physiques et en ligne. Voici un extrait du scope 3 de son bilan carbone :
- Achat de biens et services : les émissions liées à la production des tissus, teintures et autres matières premières achetées par l’entreprise auprès de ses fournisseurs ;
- Transport et distribution (en amont) : les émissions qui résultent du transport des matières premières des fournisseurs à l’usine de production, puis de l’usine aux entrepôts ;
- Utilisation des produits vendus : les émissions qui découlent de l’utilisation des vêtements par les clients, par exemple, l’énergie consommée pour le lavage, le séchage et le repassage.
Le cadre législatif du bilan carbone en France
En France, la réalisation du bilan d’émissions de gaz à effet de serre (BEGES) est prévue par l’article L 229 – 25 du Code de l’environnement. Les services de l’Etat, les collectivités territoriales de plus de 50 000 habitants, les établissements publics et d’autres personnes morales de droit public de plus de 250 agents sont tenus de réaliser leur bilan carbone tous les trois ans.
Dans le secteur privé, le BEGES est obligatoire pour les personnes morales de droit privé qui emploient plus de 500 personnes en métropole et 250 personnes en outre-mer. La fréquence de la réalisation du bilan carbone est fixée à quatre ans.
Conformément au décret n° 2021 – 1784 du 24 décembre 2021, les entreprises de plus de 50 salariés qui bénéficient d’aides dans le cadre du Plan de relance sont tenues d’établir un bilan simplifié de leurs émissions de gaz à effet de serre. Enfin, depuis le 1er juillet 2022, les groupes peuvent publier un bilan consolidé des émissions de gaz à effet de serre pour l’ensemble de leurs sociétés.
Il reste à noter que ces obligations légales ne concernent que les scopes 1 et 2 du bilan carbone, à l’exception des grandes entreprises soumises à l’obligation du reporting extra-financier (DPEF), qui doivent inclure le scope 3 depuis le 1er janvier 2023.
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