Parc éolien en mer en France : état des lieux et défis
Publié le 20/02/2024 4 minutes de lecture
Malgré un littoral important et un gisement XXL, la France ne parvient toujours pas à exploiter le plein potentiel de l’éolien en mer. Décryptage…
Parc éolien en mer : principe, état des lieux en France et défis
Dotée d’un littoral de plus de 3 400 kilomètres et bénéficiant de vents forts et constants, la France a pris le train de l’éolien en mer au début des années 2010 avec le parc éolien de Saint-Nazaire. Toutefois, le potentiel de l’Hexagone reste encore à exploiter, car notre pays bénéficie du deuxième gisement éolien en mer d’Europe, derrière le Royaume-Uni.
A l’horizon 2025, l’éolien en mer devrait permettre de répondre à 25 % des besoins en électricité des Français selon le ministère de la Transition écologique et de la cohésion des territoires… mais les défis sont nombreux, et le rythme des appels à projets reste largement en-deçà de ce qui se fait chez nos voisins.
Genèse de l’éolien en mer : du Massachusetts à Copenhague
La grande crise énergétique des années 1970, notamment les chocs pétroliers de 1973 et 1979, a fait prendre conscience à l’Europe de l’importance décisive d’une alternative à l’or noir, qui était devenu une arme géopolitique à part entière. C’est dans ce contexte que des fonds ont été injectés dans la recherche dédiée aux énergies renouvelables, notamment dans le domaine de l’éolien.
William Heronemus, professeur à l’Université du Massachusetts, est sans doute la figure la plus emblématique de cette période. Qualifié de « père de l’éolien offshore », il proposera dès le début des années 1970 des plans pour la conception de grandes fermes éoliennes sur mer.
Le concept du parc éolien sur mer a fait son chemin en Europe, notamment au Royaume-Uni où l’Energy Technology Support Unit (ETSU), sous l’égide du Department of Energy, a rassemblé des chercheurs du monde entier pour viabiliser le concept et mettre au point un projet pilote. Mais c’est au Danemark où l’idée de l’éolien en mer se concrétisera dans sa forme contemporaine sous l’impulsion de Vestas, une entreprise pionnière qui deviendra par la suite le leader mondial des turbines éoliennes.
Ces initiatives ont conduit à la réalisation du projet de Vindeby au Danemark dans les années 1990, marquant un tournant décisif dans la genèse de l’éolien offshore. Cette ferme éolienne sur mer de 11 turbines a démontré la faisabilité technique et, surtout, la viabilité économique de la technologie en milieu marin malgré les craintes des ingénieurs au sujet de la corrosion, de la maintenance et de l’acheminement de l’électricité.
Éolien en mer : comment ça marche, concrètement ?
L’éolien en mer, ou éolien offshore, consiste à installer et exploiter des turbines éoliennes en milieu marin, généralement en haute mer. Ces turbines viennent capter l’énergie cinétique des vents marins, souvent plus forts et plus constants par rapport aux vents sur terre, pour la convertir en électricité.
Le processus commence lorsque le vent frappe les pales de la turbine, ces dernières étant profilées pour capter l’énergie éolienne et reliées à un rotor, à son tour connecté à un générateur situé dans la nacelle, au sommet de la tour de la turbine.
Lorsque le rotor tourne, il entraîne le générateur qui va convertir le mouvement mécanique en électricité produite en courant alternatif (AC). Pour être transmise efficacement sur de longues distances, notamment du parc éolien offshore jusqu’à la côte, cette électricité est acheminée vers une sous-station offshore où un transformateur élève la tension du courant alternatif, réduisant ainsi les pertes d’énergie pendant le transport.
L’électricité est ensuite transmise via des câbles sous-marins blindés et isolés jusqu’à la côte. Une fois à terre, l’électricité passe par une autre sous-station où la tension est ajustée pour correspondre aux exigences du réseau électrique terrestre.
Les turbines éoliennes offshore sont équipées de systèmes de contrôle automatisés qui ajustent l’orientation de la turbine (le yaw) et l’angle des pales (le pitch) pour maximiser l’efficacité énergétique en fonction des variations de vitesse et de direction du vent. Des dispositifs de freinage sont également installés pour arrêter les turbines dans des conditions de vent extrêmes ou pour des opérations de maintenance.
Les 5 grands avantages de l’éolien en mer
#1 Une capacité XXL pour un impact paysager réduit
Les espaces maritimes permettent logiquement d’installer un plus grand nombre d’éoliennes, mais aussi de mettre en œuvre des parcs à partir d’éoliennes géantes dont l’impact paysager serait problématique à terre.
Il n’est pas rare que les rotors dépassent les 150 mètres pour mieux exploiter les vents marins et doper le rendement énergétique.
#2 Une plus grande productivité par rapport à l’éolien terrestre
En mer, le vent est plus fort, plus stable et plus régulier que sur la terre ferme. En France, les premiers parcs éoliens en mer attribués disposaient de turbines d’une puissance de 6 à 8 MW. Avec les progrès technologiques, les parcs récemment attribués (dont la mise en service est prévue à partir de 2030) embarquent des turbines dépassant les 20 MW.
Le facteur de charge des parcs éoliens en mer en Europe, qui est le ratio entre l’énergie réellement produite par les parcs et l’énergie qu’ils auraient produite s’ils avaient fonctionné constamment à leur capacité maximale, se situe autour de 45 %. L’efficacité est donc au rendez-vous.
#3 Un temps de retour énergétique relativement court
En moyenne, un parc éolien en mer érigé en France aura un temps de retour compris entre 4,5 et 6 ans.
Le temps de retour, ou temps de retour énergétique, désigne la période nécessaire pour qu’une installation éolienne produise une quantité d’énergie égale à l’énergie consommée pour sa fabrication, son installation, son fonctionnement et éventuellement sa déconstruction. Il varie selon l’efficacité des turbines, le climat au niveau du site (vitesse et régularité du vent notamment) ainsi que la qualité de l’exploitation et la maintenance.
#4 Le coût de l’éolien en mer est en baisse constante
A ses débuts, l’éolien en mer était décrié pour le coût de l’électricité qu’il pouvait produire, ce dernier atteignant jusqu’à 200 euros par MWh.
Selon l’Agence Internationale de l’Énergie (IEA), le coût de l’électricité produite par l’éolien en mer a chuté de 30 % entre 2010 et 2020, et la baisse s’est poursuivie depuis grâce à plusieurs facteurs :
- L’évolution des techniques de conception a permis de fabriquer des turbines plus grandes et plus efficaces, avec des rotors dépassant les 150 mètres de diamètre et des capacités allant jusqu’à 12 MW ou plus par turbine ;
- La construction de parcs éoliens en mer à grande échelle permet de réduire les coûts unitaires. La hausse de la demande et la production en série des composants des turbines, comme les pales et les nacelles, permettent d’activer des économies d’échelle ;
- L’industrie de l’éolien en mer bénéficie désormais d’une expérience opérationnelle significative. Les connaissances accumulées sur les meilleures pratiques de fabrication, d’installation et de maintenance des turbines réduisent les erreurs ;
- La maturation de la chaîne d’approvisionnement pour l’éolien en mer a permis de réduire les coûts logistiques, notamment pour le transport maritime ;
- Le développement de navires d’installation spécialisés et des systèmes de positionnement dynamique a rationalisé le processus d’installation des turbines. En parallèle, l’adoption de stratégies de maintenance prédictive et l’utilisation de drones et de robots pour les inspections réduisent drastiquement les coûts de la maintenance opérationnelle.
#5 L’éolien en mer, un domaine qui crée des emplois
Aujourd’hui, la filière de l’éolien en mer emploie plus de 5 000 personnes et devrait atteindre les 20 000 emplois à l’horizon 2035, comme mentionné dans le Pacte Éolien en Mer.
L’état des lieux de l’éolien en mer en France
La France ne compte qu’un seul parc éolien en mer qui tourne à plein de régime : Saint-Nazaire. Issu du premier appel d’offres lancé en 2011, ce parc éolien est situé au large de la côte atlantique, près de l’estuaire de la Loire. Il déploie une capacité de 480 MW, soit l’équivalent des besoins en électricité de 700 000 personnes (20 % de la consommation électrique du département de la Loire-Atlantique).
Le parc éolien en mer de Saint-Nazaire a été développé par un consortium composé d’EDF Renouvelables et d’Enbridge, une entreprise canadienne. Il embarque des turbines éoliennes de type Haliade 150-6MW produites par GE Renewable Energy, chacune avec une hauteur de mât d’environ 100 mètres et des pales de 75 mètres de long. Il s’étend sur une superficie de 78 km² à environ 20 km de la côte.
La France compte trois autres parcs éoliens en mer en service partiel :
- Le parc éolien en mer de Saint-Brieuc, également issu du premier appel d’offres lancé en 2011, déploie 496 MW grâce à 62 éoliennes. Il s’étend sur une superficie de 75 km² des Côtes d’Armor. Sa production électrique devrait couvrir les besoins de 835 000 personnes, soit l’équivalent de 9 % de la consommation de toute la Bretagne ;
- Le parc éolien en mer de Fécamp, qui devrait produire 497 MW grâce à 71 éoliennes déployées sur 60 km². C’est l’équivalent des besoins en électricité de 830 000 habitants (ou 380 000 foyers), soit 60 % de la consommation des habitants de Seine Maritime ;
- La ferme pilote d’éoliennes flottantes de Faraman, qui devrait déployer une puissance totale de 24 MW sur une petite superficie de 0,78 km². A terme, cette ferme pilote devrait produire l’équivalent des besoins en électricité de 40 000 personnes.
Une dizaine de parcs éoliens en mer sont aujourd’hui en cours de construction :
- Courseulles-sur-Mer (Normandie), 450 MW : mise en service partielle à partir de 2025 (en travaux)
- Yeu-Noirmoutier (Pays de la Loire), 496 MW : mise en service partielle à partir de 2025 (en travaux)
- Dieppe-Le-Tréport (Normandie), 496 MW : 2026 (en travaux)
- Dunkerque (Hauts-de-France), 600 MW : 2028 (études et préparation du dossier de demande d’autorisations)
- Centre-Manche 1 (Normandie), 1 000 MW : 2031 (études et préparation du dossier de demande d’autorisations)
- Belle-Ile-Groix (Bretagne), 250 MW : 2031 (examen des offres par la Commission de régulation de l’énergie)
- Méditerranée, 2 x 250 MW : 2031 (dialogue concurrentiel avec les candidats de la procédure de mise en concurrence)
- Sud-Atlantique – Oléron (Nouvelle-Aquitaine), 1 000 à 1 200 MW : 2032 (dialogue concurrentiel avec les candidats de la procédure de mise en concurrence)
- Centre-Manche 2 (Normandie), 1 500 MW : 2032 (dialogue concurrentiel avec les candidats de la procédure de mise en concurrence)
Les (nombreux) défis de l’éolien en mer en France
Malgré un potentiel énorme, estimé à plus de 220 GW, soit théoriquement de quoi alimenter quatre fois la population de la France, le rythme de développement de l’éolien en mer dans l’Hexagone est plus lent par rapport à nos voisins européens.
La capacité attribuée dans le cadre des éoliens en mer est restée figée à 3 530 MW pendant de très nombreuses années. Il aura fallu attendre le début des années 2020 pour voir l’attribution de 3 512 MW supplémentaires au titre des appels à projets de fermes éoliennes flottantes pilotes.
Les adhérents de France Énergie Éolienne, qui représente l’ensemble des consortiums concernés par l’éolienne en mer en France, plaident pour un rythme de 2 GW par an pour atteindre 10 GW en service en 2028… un objectif ambitieux au vu des défis techniques de la filière.
En premier lieu, le choix des fondations pour les turbines éoliennes offshore est déterminé par la bathymétrie et les caractéristiques géologiques du fond marin. Pour les eaux peu profondes, les fondations dites « monopieux », qui consistent en de grands tubes en acier enfoncés dans le fond marin, donnent de bons résultats.
Cependant, dans les eaux plus profondes, des structures flottantes ou des fondations de type « jacket » composées de cadres en treillis métalliques sont nécessaires pour soutenir les turbines. Ces fondations sont plus exigeantes dans la mesure où elles doivent résister à des forces dynamiques complexes, notamment les charges du vent, les courants marins et les vagues.
Le principal défi ici réside dans la capacité à concevoir et installer des fondations qui soient économiquement viables et capables de résister à des conditions environnementales extrêmes sur le long terme.Top of Form
L’autre défi concerne la transmission de l’énergie générée par les éoliennes offshore vers le réseau électrique terrestre. Les câbles sous-marins doivent résister à la corrosion, et leur installation nécessite des navires spécialisés équipés de systèmes de positionnement dynamique pour les déployer avec précision sur le fond marin tout en évitant les zones écologiquement sensibles.
Aussi, la maintenance des turbines éoliennes en mer est plus complexe et plus coûteuse que pour les éoliennes terrestres. L’accès aux turbines pour la maintenance nécessite des navires spéciaux, voire des hélicoptères lorsque les conditions météorologiques sont dégradées. La maintenance préventive, qui se base sur une surveillance continue et des analyses de données pour anticiper les défaillances, est décisive pour minimiser les coûts et les temps d’arrêt.
Notons également l’étude de l’impact des parcs éoliens sur l’environnement marin qui doit être menée avec rigueur, à la fois pour préserver l’environnement et favoriser l’acceptabilité sociale des projets. On parle ici des effets sur la faune marine, les habitats sous-marins et les activités de pêche.
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