Isolation thermique en entreprise : mesure fondatrice de la décarbonation  

Publié le 27/09/2023      4 minutes de lecture

Toute stratégie de décarbonation sérieuse doit prévoir, dans ses stades les plus précoces, l’élimination des passoires énergétiques. L’isolation thermique s’impose comme une solution de choix pour relever ce défi. 

Travaux d'isolation thermique sur une maison

Mise en oeuvre d’une isolation thermique chez un particulier

Les trois catalyseurs de la transition énergétique dans les entreprises   

En matière de changement énergétique, les motivations des entreprises tiennent à la fois des obligations réglementaires, des attentes de leurs parties prenantes et d’une volonté d’optimiser les coûts opérationnels. 

#1 Le renforcement de la législation sur la transition énergétique en entreprise 

La Stratégie Nationale Bas Carbone, qui vise la neutralité carbone en France à l’horizon 2050, a impulsé un renforcement progressif mais certain de la réglementation environnementale à destination des entreprises. État des lieux dans le tableau suivant : 

Loi 

Objet 

Mesures phares pour les entreprises 

Entrée en vigueur 

Loi Climat et Résilience 

Réduction de l’empreinte carbone 

Tout bâtiment commercial neuf de plus de 500 m² et tout immeuble de bureaux de plus de 1 000 m² devra installer des panneaux solaires photovoltaïques ou végétaliser 30 % de sa façade ou toiture 

A partir du 1er janvier 2023 

Les nouveaux parcs de stationnement de 500 m² devront impérativement aménager des panneaux solaires ou végétaliser la moitié de leur surface (et la totalité des ombrières) 

A partir du 1er janvier 2024 

Décret tertiaire 

Mise en œuvre d’actions de réduction des consommations d’énergie 

Réduire la consommation d’énergie finale pour l’ensemble des bâtiments à usage tertiaire de plus de 1 000 m² de 40 % en 2030, 50 % en 2040 et 60 % en 2050 par rapport à 2010. 

Octobre 2019 

Décret Publicité sur la neutralité carbone 

Interdiction de déclarer sans l’avoir prouvé qu’un produit ou service est neutre en carbone 

Les entreprises qui souhaitent promouvoir un produit ou service « neutre en carbone » doivent pouvoir le démontrer avec un bilan des émissions de gaz à effet de serre (GES), notamment. 

1er janvier 2023 

Décret BEGES 

Obligation de déclarer le bilan Gaz à Effet de Serre (GES) 

Désormais, les entreprises de plus de 500 salariés en métropole, et 250 dans les Départements et Territoires d’Outre-mer, devront intégrer les émissions directes liées à leur activité ainsi que les émissions indirectes de CO2 liées à la production d’énergie. 

1er janvier 2023 

Article L. 225 – 102 – 1 du Code de commerce 

Déclaration de performance extra-financière insérée dans le rapport annuel de gestion 

Les grandes entreprises, les PME cotées et les entreprises non-européennes opérant dans l’UE qui satisfont les critères énumérés par la loi sont tenues d’établir annuellement une Déclaration de performance extra-financière (DPEF), avec notamment des « informations environnementales et sociétales » (politique générale, pollution, économie circulaire, changement climatique, protection de la biodiversité, etc.). 

1er janvier 2024 

A bien des égards, les mesures volontaires d’aujourd’hui deviendront sans doute les obligations légales de demain. En effet, le contexte international marqué par la prise de conscience des défis climatiques laisse présager un durcissement des lois dans les prochaines années.  

Ainsi, les entreprises qui se contentent de la conformité légale aux exigences minimales prennent un risque, à fortiori si elles sont de grande taille (manque de flexibilité). Les entreprises proactives, qui anticipent et dépassent les obligations légales actuelles, se positionnent non seulement comme des leaders en matière de durabilité, mais réduisent également les risques associés à des changements réglementaires futurs.  

Cette posture permet également de débloquer un avantage concurrentiel, avec une image de marque attrayante envers les parties prenantes (salariés, candidats, investisseurs, clients…). En somme, le fait d’aller au-delà des exigences réglementaires n’est pas seulement une démarche éthique. C’est également une stratégie qui a du sens sur le plan business 

#2 Les attentes des parties prenantes en matière de respect de l’environnement 

Chaque entreprise, quelle que soit sa taille ou son secteur d’activité, est au cœur d’un réseau d’interactions avec plusieurs acteurs : clients, salariés, candidats, fournisseurs, investisseurs et populations locales. De par leur pouvoir d’influence, ces parties prenantes façonnent la trajectoire de l’entreprise et conditionnent sa pérennité. Leurs attentes en matière de respect de l’environnement n’ont jamais été aussi élevées. 

  • Clients : la décision d’achat n’est plus exclusivement dictée par le prix ou la qualité. Les consommateurs (B2C) et les acheteurs (B2B) s’intéressent de plus en plus à l’impact environnemental de leurs choix ; 
  • Salariés et candidats : l’engagement éthique et sociétal est un pilier de la marque employeur. Les entreprises les plus matures en la matière seront plus susceptibles de fidéliser leurs collaborateurs et d’attirer les meilleurs talents ; 
  • Investisseurs : les entreprises engagées dans la transition énergétique sont mieux préparées pour anticiper les grands défis du 21e siècle et saisir les opportunités du marché. Elles sont à ce titre plus attrayantes pour les investisseurs ; 
  • Populations locales : en s’inscrivant dans une démarche de transition énergétique, l’entreprise obtient le soutien des populations locales, un soutien sans lequel sa politique RSE n’aurait pas de sens. 

#3 L’impératif de l’optimisation du coût de revient 

Au-delà des motivations éthiques et réglementaires, la transition énergétique s’inscrit également dans une logique économique à travers l’optimisation du coût de revient. 

D’abord, l’adoption des mesures d’efficacité énergétique se traduit par une réduction notable des coûts opérationnels. L’emploi d’équipements moins gourmands en énergie et l’ajustement des processus de production en fonction des impératifs écologiques permettent aux entreprises de baisser leur consommation d’énergie. 

La volatilité des marchés de l’énergie présente un autre argument de poids en faveur de la transition. En diversifiant leurs sources d’énergie et en privilégiant les énergies renouvelables, les entreprises peuvent atténuer les effets des fluctuations de prix. 

La transition écologique ouvre également la voie à l’économie circulaire. Dans cette approche, les déchets ne sont plus perçus comme de simples résidus à éliminer, mais plutôt comme des ressources à valoriser. En transformant ce qui était autrefois une charge en une opportunité, les entreprises peuvent réaliser des économies et générer de nouveaux revenus. 

Enfin, cette transition permet aux entreprises d’anticiper et de se prémunir contre plusieurs risques, qu’ils soient d’ordre réglementaire, environnemental ou social… et donc de prévenir les sanctions et les interruptions de la chaîne d’approvisionnement. 

    La problématique des passoires thermiques en entreprise 

    Pour une entreprise, une collectivité ou même une maison, il est incohérent de viser la décarbonation en conservant des passoires énergétiques. 

    Les passoires énergétiques (ou thermiques) désignent les structures dont les performances en matière d’efficacité énergétique sont notoirement insuffisantes. Cela se traduit le plus souvent par une consommation d’énergie anormalement élevée pour le chauffage ou le refroidissement en raison de défauts de conception. Plusieurs facteurs expliquent (ou exacerbent) le phénomène des passoires thermiques en entreprise :  

    • Isolation insuffisante. Il s’agit de l’absence d’isolation dans certaines sections du bâtiment ou de l’utilisation de matériaux isolants obsolètes ou dégradés. Par exemple, on peut citer le polystyrène expansé ou la laine de verre ancienne génération qui ne répondent plus aux standards actuels ; 
    • Déperditions thermiques. Elles sont causées par des fenêtres à simple vitrage, des joints de fenêtres ou de portes usés, ou encore des murs comportant des ponts thermiques où l’isolation est interrompue ce qui permet à la chaleur de s’échapper. Les défauts d’isolation thermique des toitures, avec par exemple des tuiles poreuses ou des zones non protégées, sont des causes majeures de passoire thermique ; 
    • Systèmes de ventilation inadéquats. Une ventilation mal conçue peut renouveler l’air à une fréquence trop élevée ou insuffisante, empêchant ainsi la conservation de la chaleur en hiver et de la fraîcheur en été. Ce problème s’explique par l’utilisation de systèmes de ventilation mécanique contrôlée (VMC) vieillissants ou mal dimensionnés, qui n’ont pas « grandi » avec l’entreprise ; 
    • Utilisation de matériaux de construction à faible performance thermique. Certains matériaux comme le béton non isolé, les briques creuses ou le parpaing ne fournissent pas une isolation thermique optimale. Ils contribuent donc à la déperdition d’énergie du bâtiment. 
    ITE société spécialisée ravalement

    L’isolation thermique contre les passoires énergétiques en entreprise  

    Plusieurs mesures peuvent être prises pour lutter contre les passoires énergétiques. Par exemple, le choix d’équipements efficaces sur le plan énergétique (telles que les pompes à chaleur), la mise en œuvre d’une gestion technique du bâtiment (GTB, bientôt imposée par le décret BACS), l’adoption de dispositifs de régulation et de contrôle (comme les thermostats programmables) ou encore l’utilisation de sources d’énergie renouvelable (énergie photovoltaïque). Toutefois, c’est bien l’isolation thermique qui constitue la mesure phare, à la fois contre les passoires énergétiques mais aussi, plus largement, dans l’effort de décarbonation. 

    Pour le décideur, l’engagement de travaux d’isolation thermique est une décision judicieuse malgré un coût qui peut être élevé dans le cas des entreprises disposant d’un grand parc bâtimentaire. Fort heureusement, l’Etat propose des aides pour financer une partie des travaux de rénovation et amortir le coût. 

    L’isolation thermique d’une entreprise dans la pratique 

    L’isolation thermique d’un bâtiment d’entreprise repose sur une démarche méthodique qui vise à limiter les transferts de chaleur entre l’intérieur et l’extérieur. Ces travaux de rénovation consistent à poser des matériaux isolants pour former une barrière contre le froid en hiver et contre la chaleur en été ; le tout en veillant à une ventilation optimale pour que l’air intérieur reste sain. 

    Tout d’abord, une étude préalable est effectuée pour identifier les zones de déperdition énergétique, le plus souvent à l’aide d’une caméra thermique. Cette étape est décisive pour cibler précisément les zones prioritaires et définir le type et l’épaisseur des matériaux isolants à utiliser. 

    Les murs, notamment la façade, sont souvent la cible principale des travaux. L’isolation thermique des murs par l’intérieur est réalisée en posant des panneaux ou des rouleaux d’isolants comme la laine de verre, la laine de roche ou le polystyrène directement sur les murs. Ces matériaux isolants sont ensuite recouverts d’une plaque de plâtre. L’isolation thermique par l’extérieur (ITE) consiste plutôt à envelopper le bâtiment d’une couche d’isolant protégée par un revêtement de finition. Cette méthode est particulièrement efficace car elle évite les ponts thermiques. 

    Qu’est-ce qu’un pont thermique ? 

    Il s’agit d’une zone localisée dans l’enveloppe d’un bâtiment où l’isolation est réduite, voire interrompue, conduisant à une augmentation des flux de chaleur entre l’intérieur et l’extérieur. C’est un genre de « raccourci » que prend la chaleur pour traverser une paroi et contourner l’isolation. Les ponts thermiques sont généralement localisés au niveau des irrégularités ou discontinuités de l’isolation thermique comme les intersections entre les murs, les planchers et les toits. 

     Avec les murs et la façade, le toit est l’autre grande source de déperdition d’énergie. Les matériaux isolants sont posés soit directement sous la toiture, soit au niveau du plancher des combles. La technique choisie dépend de l’accessibilité des combles et de leur utilisation éventuelle dans les locaux de l’entreprise : 

        • Combles perdus (inaccessibles ou non aménagés). Dans ce cas, l’isolation se fait généralement au niveau du plancher des combles, le plus souvent via le soufflage d’isolants en vrac (comme la laine de verre ou la ouate de cellulose). Cette technique permet de couvrir uniformément toute la surface, même les recoins difficiles d’accès, pour une isolation thermique optimale ; 
        • Combles aménageables (accessibles et destinés à des usages professionnels). Si les combles sont prévus pour être transformés en espaces dédiés à des activités professionnelles (bureaux ou salles de réunion par exemple), l’isolation se fait alors directement sous la toiture. Dans ce cas, des isolants en rouleaux ou en panneaux, comme la laine de roche ou le polyuréthane, sont posés entre les chevrons du toit. Cette méthode permet d’isoler efficacement tout en conservant un espace de travail optimal dans les combles. 

    Les fenêtres et portes peuvent également être responsables de grandes déperditions si elles sont anciennes ou de mauvaise qualité. Le double ou triple vitrage est préférable, avec des cadres bien étanches. Ces fenêtres limitent les échanges thermiques grâce à une lame d’air ou de gaz inerte entre les panneaux de verre. 

    En parallèle des travaux d’isolation, une ventilation adaptée doit être mise en place pour garantir une qualité d’air intérieur et éviter les problèmes d’humidité. Les systèmes de ventilation mécanique contrôlée (VMC) sont privilégiés, notamment la VMC double flux qui récupère la chaleur de l’air vicié évacué pour préchauffer l’air frais entrant, renforçant ainsi l’efficacité de l’isolation en minimisant les pertes thermiques dues à la ventilation. 

    Tout au long des travaux de rénovation, des tests d’étanchéité peuvent être réalisés pour s’assurer que l’isolation est bien hermétique et que les performances escomptées sont au rendez-vous. Une fois les travaux achevés, le bâtiment d’entreprise devient plus efficace sur le plan énergétique et propose un meilleur niveau de confort aux collaborateurs.

    Travaux d’isolation thermique en entreprise : la checklist du décideur   

    La réussite d’un projet d’isolation thermique pour votre entreprise repose sur une planification rigoureuse et une connaissance approfondie des étapes clés. De l’évaluation initiale au suivi post-intervention, chaque étape mérite une attention particulière pour maximiser les retours sur investissement et garantir une performance énergétique optimale dans les délais impartis. 

    #1 L’évaluation initiale 

    Commandez un audit énergétique professionnel. Vous obtiendrez une cartographie précise des déperditions thermiques et des recommandations ciblées pour y remédier. 

    #2 Le choix de la société 

    Recherchez des professionnels certifiés RGE (Reconnu Garant de l’Environnement). Cette certification est un gage de qualité et conditionne l’accès à certaines aides de l’Etat. La garantie décennale est standard dans le bâtiment, mais assurez-vous qu’elle couvre bien tous les travaux d’isolation thermique. Elle vous protègera pendant 10 ans contre d’éventuelles malfaçons. Prenez soin de demander plusieurs devis (au moins trois) pour comparer les offres. 

    #3 Le budget et le financement 

    Les coûts varient en fonction des solutions choisies. Voici toutefois une fourchette de prix : comptez entre 20 € et 100 € le m² pour une isolation par l’intérieur et entre 80 € et 220 € le m² pour une isolation par l’extérieur (pose incluse). Renseignez-vous sur les aides de l’Etat et des collectivités qui peuvent considérablement réduire le coût des travaux d’isolation. Aussi, certaines banques proposent des prêts à taux zéro ou des crédits d’impôt pour les travaux de rénovation énergétique des entreprises. 

    #4 La planification des travaux d’isolation thermique 

    Selon l’envergure du projet et les techniques utilisées, les travaux peuvent durer de quelques jours à plusieurs semaines. Envisagez de diviser le projet pour minimiser les perturbations (phasage). Par exemple, isolez une aile du bâtiment à la fois, dans la mesure du possible. 

    #5 Les réglementations et les normes 

    Assurez-vous de respecter la Réglementation Thermique 2020 (RT ou RE 2020) et faites en sorte de conserver tous les rapports, schémas et attestations de conformité. 

    #6 Les retours et les ajustements 

    Suite à la finalisation des travaux d’isolation, il est conseillé de procéder à un nouveau diagnostic de performance énergétique (DPE) du bâtiment. Réalisé par des professionnels certifiés, ce diagnostic permettra de quantifier précisément les gains en efficacité énergétique obtenus grâce aux travaux d’isolation et de comparer les performances du bâtiment avant et après intervention. 

    Afin de suivre en temps réel la consommation énergétique de votre bâtiment post-travaux, vous pouvez installer des systèmes de monitoring énergétique, couplés à des capteurs et des compteurs pour surveiller constamment la consommation en électricité, le chauffage, etc. L’analyse des données collectées permettra d’identifier rapidement toute anomalie ou surconsommation en vue d’une intervention rapide. 

    Comment financer les travaux d’isolation thermique en entreprise ?   

    En France et selon nos recherches, le prix de l’isolation thermique qui répond aux standards des DTU est compris entre 150 et 220 € au mètre carré, pose incluse. Les entreprises peuvent financer leurs travaux avec le prêt Éco-Énergie (PEE) proposé par Bpifrance aux micro-entreprises, TPE et PME de plus de 3 ans (jusqu’à 500 000 €) ou encore le dispositif des Certificats d’Économies d’Énergies (CEE).  

    Enfin, l’ADEME propose des subventions aux entreprises, aux collectivités, mais aussi aux associations, organismes de recherches et doctorants qui souhaitent contribuer à la mise en œuvre de la transition écologique et énergétique.