Faut-il rendre l’assurance MRH obligatoire ?
Publié le 05/09/2023 4 minutes de lecture
par la rédaction de “L’Argus de l’assurance”
Si l’assurance habitation est requise pour les locataires et les copropriétés, elle ne l’est pas pour les propriétaires. Un sujet qui prend une dimension nouvelle avec la multiplication des risques climatiques hors régime cat’nat’.
Pour sûr, 2023 restera une année charnière dans la prise de conscience de l’impact concret du changement climatique sur le monde de l’assurance. Le lancement d’une mission sur l’assurabilité des risques climatiques, annoncée fin mai par le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, Christophe Béchu, symbolise ce changement de perspective et doit aboutir à des recommandations d’ici à la fin de l’année.
Mais sur le marché de l’assurance habitation, un autre phénomène a aussi fait son apparition, dans un premier temps outre-Atlantique: le refus explicite d’assurance de la part de deux assureurs nord-américains d’importance, Allstate et State Farm. « State Farm General Insurance Company a pris cette décision en raison de l’augmentation historique des coûts de construction, au-delà de l’inflation, ainsi que d’une exposition aux catastrophes naturelles en croissance rapide, et d’un marché de la réassurance difficile », justifiait le 26 mai dernier le premier assureur dommages californien. Par ailleurs, en Floride, la compagnie Farmers Insurance amis en place des restrictions dans la souscription de nouveaux contrats, pour gérer plus efficacement son exposition à des risques climatiques de plus en plus intenses et fréquents, notamment aux ouragans.
La notion d’assurabilité commence aussi à avoir des conséquences concrètes en France, même si, comme le souligne Antoine Quantin, directeur de la réassurance et des fonds publics chez CCR, « si l’habitation est bel et bien assurée, l’extension de garantie contre les catastrophes naturelles, est obligatoire. Si l’assuré se voit refuser la souscription d’un contrat d’assurance du fait de son exposition aux catastrophes naturelles, il peut saisir le bureau central de tarification (BCT). Mais à l’heure actuelle, très peu de cas remontent au BCT ». Et d’ajouter que « l’État n’a pas voulu rendre l’assurance habitation obligatoire pour une bonne raison : est-ce son rôle de forcer les Français à assurer leurs propres biens dès lors qu’il n’y a pas de conséquence pour les tiers ? ».
Le désengagement des assureurs
Toutefois, ce qui s’est récemment passé en Californie ou en Floride n’étonne guère le cofondateur d’Assurland, Olivier Moustacakis. « Le fait que certains assureurs se mettent en retrait sur certaines zones géographiques n’est pas si nouveau. C’est ce qui a notamment pu être observé en Corse pour couvrir les résidences secondaires sujettes à plastiquage. »
Un sujet en particulier retient l’attention : les zones littorales. « Certaines situations ne relèvent pas du régime cat’ nat’ : la question des incendies de forêt est un sujet très spécifique cantonné aux forêts privées – les habitations situées à proximité étant couvertes par la MRH. Celle de l’érosion côtière constitue aujourd’hui le principal problème et ne relève pas de mécanismes assurantiels », expose ainsi Antoine Quantin. « Certains assureurs se retirent discrètement de ce marché spécifique », confirme Olivier Moustacakis. Une situation qui n’a pas échappé à l’Association nationale des élus du littoral (Anel), qui tire la sonnette d’alarme. « Nous traitons le sujet de l’accès à l’assurance de manière croissante depuis quelques années, mais 2023 constitue une bascule », nous confie son délégué général, Florentin Chauvin.